Parasite

Comment parler d’un film qui a tout gagné ? Comment parler d’un film qu’on a eu la chance de voir avant même sa sortie salles grâce aux avant-premières ayant eu lieu dans toutes la France, avant de voir se dérouler l’incessant raffut des récompenses pour un réalisateur que l’on adore ? Retour sur Parasite, film somme du cinéma de Bong Joon Ho distribué par The Jokers dès le festival de Cannes.

Toute la famille de Ki-taek est au chômage, et s’intéresse fortement au train de vie de la richissime famille Park. Un jour, leur fils réussit à se faire recommander pour donner des cours particuliers d’anglais chez les Park. C’est le début d’un engrenage incontrôlable, dont personne ne sortira véritablement indemne…

Discuté, analysé dans tout les sens, difficile de ne pas répéter ce qui a déjà été écrit sur Parasite, parabole cruelle et sociale qui voit la famille Kim arnaquer la famille Park dans les grandes largeurs, mais avec des règles qui ne seront jamais à leur avantage.

Si la symbolique de Snowpiercer était aussi rectiligne que le train lui-même, Parasite serpente quant à lui autour de ses personnages, de ses lieux et étouffe de son intrigue toute possibilité qu’ils s’en sortent par un jeu de pouvoir fluctuant exprimé avec une telle clarté par la mise en scène qu’une partie du public en a été estomaqué, refusant au métrage un réalisme qui est vu en France comme une forme de faiblesse narrative ?

Parasite

Car nombreux sont celles et ceux qui ont pensé voir les Park comme des victimes des Kim, mais c’est ignorer tant d’indices livrées par le contexte afin de se sentir confortable dans sa douceur bourgeoise une fois rentré du cinéma, mais les faits son là : le capitalisme c’est pourri, et en Corée du sud le cas est aggravé par le passé colonial du pays et la présence américaine.

Des critiques qui était déjà bien présentes dans The Host, mais qui sont tournés ici vers les personnages et ce théâtre qu’est la maison des Park, depuis l’usage de l’anglais jusqu’au twist du sous-sol, le scénario co-écrit avec Han Jin-won est tellement enrichi par la mise en scène de Bong Joon Ho que le succès du film, que ce soit au niveau public que professionnel, est insolent, au point où des âmes chagrines ont discuté les qualités réelles du métrage.

Parasite

Elles sont non seulement réelles, mais on retrouve ces dernières dans toute la filmographie du réalisateur, depuis ses débuts avec Barking Dog never bites, la découverte à l’international avec Memories of Murder jusqu’à cette définitive consécration, rappelant quelque part la trajectoire de Guillermo Del Toro, lui aussi récompensé il y a peu avec La forme de l’eau et dont les mêmes doutes avaient été soulevés. Avec la même réponse : la constance de ces metteurs en scène vaut tout autant récompense vu les années passées à créer des films sans compromis artistique.

Et comme la quasi-totalité de la filmographie de Bong Joon Ho, Parasite s’enrichit au revisionnage d’une pléthore de détails masqués par le plaisir de la découverte, tout comme la ressortie en noir et blanc permet de se focaliser sur les choix de cadre et de composition, et la sortie imminente du Blu-ray collector assorti de nombreux bonus risque d’apporter encore beaucoup d’eau au moulin des analyses filmiques !


■ Parasite ■ Réalisé par Bong Joon Ho ■ Sortie française le 05/06/2019 ■ Durée : 132 minutes ■ Avec Song Kang-Ho, Woo-sik Choi, Park So-Dam…