The Gentlemen

Avec cette sortie numérique ce jeudi 28 mai avant une sortie physique le 10 juin, Guy Ritchie boucle la boucle pour la deuxième fois avec The Gentlemen après le très discuté Le Roi Arthur : La Légende d’Excalibur et l’encore plus discutable remake en live action d’Aladdin. Douze ans après RocknRolla, un second film de la rédemption ?

Quand Mickey Pearson, baron de la drogue à Londres, laisse entendre qu’il pourrait se retirer du marché, il déclenche une guerre explosive : la capitale anglaise devient le théâtre de tous les chantages, complots, trahisons, corruptions et enlèvements… Dans cette jungle où l’on ne distingue plus ses alliés de ses ennemis, il n’y a de la place que pour un seul roi !

Si le réalisateur d’Arnaques, Crimes et Botanique avait déjà connu des errements créatifs à l’époque de À la dérive et de l’épouvantable Revolver, il avait fini par retomber sur ses pieds avec RocknRolla et ce dernier semble être encore une fois la note d’intention de ces Gentlemen.

De retour également la déstructuration du récit, les points de vue de personnages complètement lunaire, un montage vif mais toutefois plus spatialisé (merci Aladdin ?), une utilisation de la musique toujours réjouissante pour habiller un récit mené en grande partie par Matthew McConaughey, dont le personnage est paradoxalement le moins intéressant du lot.

Une faille vite oubliée par la capacité du comédien à être impeccable en toutes circonstances (ce que l’on sait ici depuis bien longtemps), cédant régulièrement la place à son entourage d’acteurs plus ou moins réguliers, depuis Charlie Hunnam jusqu’aux performances complètement inattendues de Hugh Grant, journaliste gay aussi fouineur que méphitique, et de Colin Farrell en patron terre à terre d’un club de boxe entraînant des jeunes de banlieue habillés en survêtements à carreaux.

Véritables soupapes comiques au sein du métrage, ces deux personnages sont à l’origine des meilleures blagues et des situations les plus cocasses, le dernier étant bien aidé par une équipe de petite frappes bien décidées à tourner des clips de rap, un moment aussi inattendu que rafraîchissant qui rappelle les ambitions méta-textuelles de Revolver, mais cette fois-ci réussies.

Si le reste du casting joue les utilités, les prestations sont propres et il est toujours agréable de voir Henry Golding dans le registre du jeune chien fou, tandis que Tom Wu passe du Kung Fu George du Roi Arthur : La Légende d’Excalibur à ici un certain Lord George. Enfin, le toujours parfait Eddie Marsan joue un antagoniste que l’on se délecte de détester.

Si l’on évoque beaucoup le retour au sources avec The Gentlemen, c’est plutôt de réinvention que l’on devrait parler : Ritchie, accompagné d’Alan Stewart, chef opérateur de sa précédente sortie, teste au final bien peu de choses au niveau plastique par rapport à ses derniers blockbusters et recycle sur un autre ton les quelques réussites accumulées depuis ses deux Sherlock Holmes et l’injustement boudé Agents très spéciaux: Code U.N.C.L.E.

En terme de script, il a su trouver en Hugh Grant et son rôle de Fletcher, journaliste fouineur et spéculateur le porte voix parfait pour tenir le rythme cahin-caha qui fait la signature du réalisateur britannique depuis ses débuts. Côté musique, il donne sa chance à Christopher Benstead, vétéran du montage musical sur de nombreux films et ici promu au rang de compositeur après avoir donné un coup de main pour compléter la bande originale d’Aladdin.

Il reste au final une question à se poser à la fin des 113 minutes de ces Gentlemen : reste-t-il encore quelque chose de pertinent que Guy Ritchie aurait à dire ? Après plus de vingt ans à osciller entre une filmographie de gangster et des tentatives malheureuses de faire entrer son style dans le monde des blockbusters, constamment écharpé par la critique pour ses idiosyncrasies pourtant bien reconnaissables, le réalisateur britannique s’est à nouveau attelé à remaker un film. Preuve d’une impasse ou nouvel embranchement ? Il faudra voir Cash truck, adapté du Convoyeur de Nicolas Boukhrief pour en avoir le cœur net.


■ The Gentlemen ■ Réalisé par Guy Ritchie ■ Sortie française le 05/02/2020 ■ Durée : 113 minutes ■ Avec Matthew McConaughey, Charlie Hunnam, Michelle Dockery, Hugh Grant, Colin Farrell…