La femme des steppes, le flic et l’œuf

Après Le Mariage de Tuya, qui dressait déjà le portrait d’une femme combattante, le réalisateur chinois Wang Quanan revient avec La Femme des steppes, le flic et l’œuf, disponible en DVD/VOD depuis le 1er décembre :

Le corps d’une femme est retrouvé au milieu de la steppe mongole. Un policier novice est désigné pour monter la garde sur les lieux du crime. Dans cette région sauvage, une jeune bergère, malicieuse et indépendante, vient l’aider à se protéger du froid et des loups. Le lendemain matin, l’enquête suit son cours, la bergère retourne à sa vie libre mais quelque chose aura changé.

La femmes des steppes, le flic et l’œuf s’ouvre sur la découverte d’un cadavre au milieu du désert de la steppe. Entre en scène le vieux flic, le jeune flic et la bergère, seule habitante à des kilomètres à la ronde. Cette sensation d’immensité et de grande distance entre le spectateur et les personnages donne l’impression d’être dans un jeu de miniature examiné à regard d’enfant. Cette dénomination faussement simpliste des personnages apporte une connexion directe aux émotions de ces derniers.

La femme des steppes, le flic et l'œuf

Sous ses airs de whodunit, l’enquête sert surtout de révélateur au désœuvrement et l’alcoolisme latent des hommes des steppes. Les questionnements existentiels du rookie qu’est le jeune flic sont égrainés au fur et à mesure du voyage vers le commissariat.

Le film se recentre petit à petit autour du personnage de la bergère (Dulamjav Enkhtaivan), aussi surnommée “le dinosaure” de par son statut de femme vivant seule et sans enfant. La mise en scène fait preuve de beaucoup de pudeur pour explorer les moments intimes de sa protagoniste et met l’emphase sur le travail quotidien auprès des animaux. Son choix de vie et l’isolement nécessitent une force mentale et physique dans cet environnement.

La femme des steppes, le flic et l'œuf

Elle se révèle le point d’attention de ce long métrage au départ par sa relation à l’enquête, puis par sa reconquête d’elle-même au niveau sociétal. Le portrait de femme mature reste encore trop rare au cinéma car souvent perçue comme sans intérêt et anti-héroïque, alors que les anti-héros eux ne manquent pas, kof kof. On peut néanmoins faire le lien avec Le Portrait d’une femme chamane et The Bacchus Lady qui ont su mettre en avant des femmes marginales dans leur beauté, leur multiplicité et leurs aspérités.

Avec La femme des steppes, le flic et l’œuf, Wang Quanan prend le parti de l’abstraction des grands espaces pour toucher avec justesse à l’intime et à la pureté des émotions de ses personnages. Si vous n’êtes pas familier avec l’univers du réalisateur, ce film permet un point d’entrée pertinent dans les thématiques sociales qui ressortent de son cinéma. Le DVD est accompagné d’une masterclass très complète permettant d’approfondir son œuvre.


■ La femme des steppes, le flic et l’œuf ■ Réalisé par Wang Quanan ■ Sortie française le 01/12/2020 ■ Durée : 102 minutes ■ Avec Dulamjav Enkhtaivan, Aorigeletu, Norovsambuu Batmunkh…