Le Septième Fils

Par un après midi d’hiver, Nicolas et moi avons décidé de faire une plongée dans la fantasy dans une mythique double séance : Le Hobbit suivi par Le Septième Fils. J’ai décidé de vous parler du second car il recèle malgré lui un potentiel Voltanesque inespéré.

L’histoire : Maître Gregory, épouvanteur de son état, perd son dernier apprenti (le jeune Jon Snow, vous savez, celui qui ne sait rien) lors d’un combat avec Mère Malkin, la sorcière badass du coin qui se trouve aussi être son ex. Il part alors à la recherche d’un septième fils de septième fils (rien à voir avec Iron Maiden, hélas), réputés pour leur force et leur vaillance face aux démons et aux créatures qui mettent le dawa dans cet univers fantastique.

Gregory recrute alors Tom (Ben Barnes), un jeune paysan, qu’il va devoir former aux us et coutumes des épouvanteurs, mais c’est sans compter sur Mère Malkin qui va user de ruses et de séduction pour empêcher l’ambitieuse entreprise.

La narration en tant que telle représente un schéma classique de la dark fantasy mais le problème se trouve ici dans la façon dont cela nous est raconté. On passe par exemple un temps terriblement long à nous présenter les différents démons que va devoir confronter Tom, sans qu’aucun d’entre eux ne soit réellement exploité.

J’estimais être au moins en droit d’avoir des confrontations digne de Mortal Kombat, mais même pas. Les comptes finissent par se régler dans une arène étriquée à l’architecture antique pseudo grecque, pas du tout aidée par un montage rendant les combats illisibles.

La chef d’orchestre de cet affrontement n’est autre que Mère Malkin, interprétée par une Julianne Moore en roues libres, oscillant entre rires diaboliques et drague lourdaude auprès de nos héros parce que tu vois, c’est une sorcière !

Collection féminine dark fantasy de bazar hiver 2014.

Je soupçonne d’ailleurs cette dernière d’avoir acceptée le rôle pour se faire un plaisir hédoniste avec les jolis corsets présents sur le plateau, ce que je peux comprendre en tant que fétichiste des beaux costumes. Seulement en l’état, on assiste plus à un honorable défilé Victoria’s Secret mention “cuir et dentelles” qu’à une véritable menace pour nos héros.

Le traitement des autres personnages féminins se place dans même lignée, notamment celui d’Alice (Alicia Vikander), une métisse sorcière-humaine sensée apporter de la modernité, qui va se retrouver coincée dans le rôle d’un love interest d’une mollesse extrême tandis que son inutile maman est fièrement cabotinée par Anje Traue (Man of Steel).

Quant à nos héros, Jeff Bridges retrouve Moore, qu’il avait déjà côtoyé sur The Big Lebowski. Il nous livre ici une interprétation de Maître Gregory digne d’Abraham Simpson, le doublage français n’arrangeant rien. L’Epouvanteur passe son temps à râler, à tel point que son comportement oscille de drôle à agaçant à la vitesse de la lumière.

On finit par être content lorsque celui-ci va voir ailleurs si il y est.

Le jeune Ben Barnes aka “prince Caspian de Narnia” dégringole l’échelle sociale en jouant un apprenti pas très motivé par la perspective d’avenir du métier d’épouvanteur. Pour ne pas se faire taper sur les doigts, on peut dire qu’il fait le minimum syndical en faisant acte de présence à l’écran.

En fait, le seul personnage qui a suscité chez moi de l’empathie est le troll Tusk, même s’il n’égale pas son alter ego dans Hansel et Gretel : Chasseurs de sorcières, il dégage une certaine sincérité. On sent que John DeSantis a fait tout son possible pour son rendre son maquillage prosthétique vivant alors que son mono-sourcil le  rend moins expressif que le cyclope de Krull.

Qui plus est, Tusk est sans cesse oublié par Maître Gregory et Tom, on finit alors par se dire qu’il est bien courageux de supporter ces deux là.On remarque cependant vite que c’est plutôt le montage qui oublie le pauvre troll, une maladresse d’agencement de l’histoire qui tente d’être compenser par l’abus de CGI foireux.

Nos personnages principaux à l’anti-charisme ravageur bénéficie d’un entourage de premier choix comme Olivia Williams dans le rôle de la mère de Tom, Djimon Hounsou et Jason Scott Lee en démons de Mère Marlkin. Ils sont hélas sous-exploités ! A l’inverse des figurants lettons qui prennent un malin plaisir à troller les scènes d’action.

Collection masculine dark fantasy de bazar hiver 2014.

Tout cet univers est baigné dans une ambiance vaporeuse qui plonge le spectateur dans une torpeur assez efficace au bout d’un tiers du film. Cette atmosphère cotonneuse s’installe d’autant plus que la réalisation de Serguei Bodrov reste fonctionnelle mais sans aucune saveur. Heureusement que l’on est quelquefois réveillé par des punchlines aussi débiles qu’inattendues.

A un moment, Tom rêve de sa mère et en lui parlant, il lâche : “Maman, qu’est-ce qu’il se passe, je comprends rien.” Cette réplique m’a valu un fou rire d’un bon quart d’heure dont j’ai eu bien du mal à me remettre. Et bien sûr, pendant ce temps, Tusk attend, en plein danger de mort, se retient d’une main au bord d’une falaise (magie du montage !On ne sait pas depuis combien de temps il est là), la totale, quoi !

Pour répondre à la question d’Alice à la fin du film : “Alors, est-ce que ça fait mal ?”

Sinon Bridges prenait des photos sur le tournage et ça avait l’air tellement mieux. 

Le Septième Fils est un film qui cherche à en faire trop tout en ayant rythme malmené. Je n’espérais pas un grand film mais au moins de quoi m’inciter à ouvrir un livre de la saga de l’Epouvanteur, dont il est l’adaptation et en cela, il a complètement échoué, ce qui est dommageable pour l’œuvre originale.

Le film pourrait avoir une bonne place sur le site de Nanarland tant on y passe plus de temps à rire qu’à soutenir les héros. A regarder avec des bières et des copains !  


■ Le Septième Fils   ■ Sorti le 17/12/14   ■ Réalisé par Sergei Bodrov   ■ Avec Jeff Bridges, Julianne Moore, Ben Barnes…   ■ Durée : 102 minutes