Bande dessinée : Krrpk (tomes 1 et 2)

Commencé dès 2008 sur un blog par Bill Otomo, Krrpk a fini par trouver son chemin sur le format papier grâce à la collection Shampooing dirigée par Lewis Trondheim. Ce qui nous a donné la sortie en juillet 2012 de ce premier tome, intitulé Krrpk doit mourir, qui voit notre petit héros éponyme découvrir un monde bien loin de chez lui, rempli d’extra-terrestres injustes, lubriques, voire même les deux à la fois…
…et le moins que l’on puisse dire, c’est que Bill sait écrire sa satire (satyre ?) car à travers le récit de ce petit extra-terrestre immigré vers un centre urbain, c’est un comique de situation bien grave qui s’installe, entre papiers à tamponner, visas consentis via des demi-mots racistes et un mépris absolu. Ce qui sauve Krrpk de son pouvoir dépressif, c’est son héros, à la fois couillon et opportuniste, qui finit par baiser autant qu’il se fait baiser par l’immonde société Grook.

Un fond qui tranche délicieusement avec la forme employée par Bill Otomo ( faisant partie de l’excellent Studio Catfish Deluxe) très mignonne et remplie de monstres que l’on imagine peuplée d’entiers magasin de peluches…sauf quand ceux-ci évoquent les multiples manières de s’accoupler, depuis la logeuse perverse du Pokkrann à son crush, Naë, qui deviendra accro à ses acrobaties sexuelles.

Le tome 2 poursuit d’ailleurs sur la même lancée en enfonçant d’autant plus le clou, depuis les évocations des luttes syndicalistes qui tournent au vinaigre et les nombreuses occurrences de racisme et de classisme jusqu’au  au retour de Krrpk au bercail pour la saison du Grand Krrhrg, qui nous éclaire sur la vie de ses contemporains, qui sont aussi obsédés que les autres aliens envers la chose, bien que les Pokkranns ne se reproduisent que par partho…mais je m’égare ! 

La structure des planches d’Otomo est faussement simpliste, ce qui fait que, comme dans le décalage fond/forme, on se laisse facilement prendre par le récit et les compositions chatoyantes des différentes cases, qui mériteraient franchement une adaptation animée bien trash, tant on imagine sans effort tout ça vivre et bouger.  
Parodie de notre société dont certaines pointes tapent douloureusement juste, Krrpk se révèle aussi drôle que tragique, accompagné d’une galerie de personnages aussi méprisables qu’hilarant, que j’espère retrouver dans un tome 3 très prochainement.  

■ Krrpk   ■ Paru le 4 juillet 2012 et le 8 octobre 2014   ■ Ecrit et dessiné par Bill Otomo ■ Paru aux Editions Delcourt, collection Shampooing   ■ 130 pages   ■ Deux tomes publiés