Billet d’humeur : Dinosaurus, une culture à croquer ?

Tout a commencé lors d’un gros débat culinaire avec Nbu sur la question de la place culturelle du biscuit Dinosaurus, or pour lui il n’en a aucune puisque c’est “juste” de la nourriture alors que selon moi, elle existe belle et bien ! Un sondage sur notre page Facebook plus tard, vous, lecteurs, vous avez départagés et c’est ainsi que je vais aujourd’hui vous parler gâteau.

J’ai pris mon plus beau kit d’archéologue et je suis partie à l’aventure, remontant le temps grâce à l’internet. Historiquement, au sujet même de la recette, on la trouve du côté de Bilbao, en Espagne, dans la biscuiterie industrielle du groupe Artiach.
Leurs spécialités : les biscuits à base de céréales et de chocolat. Les Dinosaurus sont donc une simple variation naturelle de leurs produits et en 1988 l’entreprise ibérique conduit un partenariat de distribution pour la France avec Lu, lançant le business des sauriens biscuités !

Pour ce qui est de la création du concept même des Dinosaurus, j’aurais aimé vous parler d’un artiste, descendant de Picasso, faisant naître la forme des biscuits de ses mains, le tout avec une vibe telenovela. Seulement, la réalité est bien moins sexy.

Par contre, on trouve un décodage du marketing de Lu attaché à la notion de fun food, Gilles Brougère, universitaire à Paris 13 et spécialiste du jouet a produit un texte très intéressant sur le sujet. Je vous résume ce qu’il en ressort : la notion de fun food est l’assemblage d’un biscuit en forme de mascotte, un emballage aux couleurs vives et un cadeau. Le but étant d’attirer l’attention de l’enfant consommateur et de le faire revenir vers la marque.
Ouais, je sais, c’est dur ! On fantasmait un(e) beauté ibérique type Banderas ou Cruz à la contribution du succès des biscuits dinosaures et bien c’est râpé ! C’est plutôt tendance réunion austère avec diagrammes, cravates et bureau en formica.
Le marketing calculé des Dinosaurus a bénéficié d’un excellent timing en lançant ses premières publicités dès 1989 avec le partenariat d’émissions pour enfants (Club Dorothée partner wesh !). En plus, la sortie du premier volet de Jurassic Park dès 1993 a fini de faire entrer les gâteaux chocolatés dans les placards de tout les foyers français.
Nous autres, enfants durant les années 90, en avons mangé aux goûters et continuons aujourd’hui à en grignoter. Ceux d’entre nous qui ont des enfants leur en achètent certainement prouvant que Dinosaurus est devenu un biscuit inter-générationnel.
Note de Nbu : …mais tu voulais pas me convaincre que c’était un objet culturel ? 
Patience jeune padawan ! J’y viens ! La passion autour du biscuit Dinosaurus regroupe environ 200 000 fans sur les pages Facebook de part et d’autre de la frontière espagnole. La page française est tenu par des gourmands et non par la marque, aussi elle permet de créer des échanges sur des sujets comme les collections de cadeaux collector (cartes, magnets, autocollants,…) ou les différents goûts présents en magasin.

La création de groupes sort le produit marketé de sa simple consommation pour l’emmener vers une vraie pratique culturelle. Preuve en est, lors du rachat de Dinosaurus par l’entrepreneur belge Lotus, les amateurs du biscuit se sont sentis trahis par le changement de packaging et surtout l’absence des autocollants dinosaures. Dur dur d’aimer les Dinosaurus

— Tim (@acupoftim) 28 Avril 2015

Enfin pour culturer ça comme il se doit ! Les biscuits dinosaures sortent de leur boites jaunes pour se retrouver sur des blogs de recettes : La Super Supérette en France et Dulce Nani, son homologue espagnole. Parce qu’au delà de la fascination de l’objet, on retrouve une recherche du goût de l’enfance et le faire soi même c’est tellement gratifiant !
Ce mouvement Do It Yourself prouve l’aura des Dinosaurus et fait la nique à la biscuiterie industrielle. Bon, résumons : nous avons une recette espagnole, un marketing rôdé, un public expressif et nombreux et enfin une appropriation du produit par ce dernier. Du coup on a… on a… un produit culturel ! 
Vous le voyez le problème ? (Sinon lisez Dakota McFadzean, c’est le bien)

Un parfait produit culturel même, mêlant nostalgie et appétit, on peut aisément le rapprocher de l’éternel retour de Star Wars dont tout le monde se demande quel goût aura le prochain, tout comme Star Trek et un bien sûr  le très peuplé de dinosaures Jurassic World et comme la liste est longue je préfère m’arrêter là. 

Je comprends qu’on apprécie les saveurs d’enfance et c’est la consommatrice de Dinosaurus qui parle, mais il est bon de tester d’autres produits. Même si c’est prendre le risque qu’ils soient dégueulasses, se rendre compte de son attachement, c’est déjà avancer et faire preuve de plus curiosité.