Je vous parle aujourd’hui d’une bande dessinée avec laquelle j’ai tissé un lien particulier depuis au moins trois ans. Et il s’agit de Lost at Sea, de Brian Lee O’Malley, dont vous avez pu apercevoir le travail dans le film adapté de son œuvre la plus connue en France : Scott Pilgrim vs The World.
Lost at Sea nous plonge dans un road trip où l’on suit une héroïne introvertie, Raleigh, accompagnée par ses amis de lycée qu’elle avait perdu de vue depuis quelques années. La petite bande se compose de l’expansive Stéphanie, son meilleur ami Dave et celui qui conduit, le discret Ian. Le voyage va révéler les caractères de chacun et les relations entre eux, tout en étant rythmé par les songes hantés de chats de Raleigh.
Raleigh est une héroïne singulière, qui se cherche et se demande quelle est sa place au sein du groupe. Cette forte introspection se ressent au fil des pages et happe facilement le lecteur. On pourrait croire que notre protagoniste va évoluer aux côtés de Dave, mais c’est avec Stéphanie qu’elle va au final tisser une amitié particulière. D’un caractère plus spontané, la jeune fille va naturellement aider Raleigh à trouver un sens à ses rêves.
On peut dire qu’entre les deux là, ce n’est pas joué d’avance ! |
Les scènes quotidiennes s’inscrivent dans une composition de pages classiques et symétriques favorisant ainsi les échanges entre les personnages. Raleigh et Stéphanie nous apparaissent tout d’abord lointaines l’une de l’autre dans les compositions des cases, pour se rapprocher petit à petit au fil de l’aventure, jusqu’à cohabiter dans le même espace.
Les moments de songes se dessinent quant à eux dans une totale déconstruction des pages. On ressent ainsi la perte de contrôle de Raleigh sur ses sentiments et on s’associe à sa quête de sens au sujet des félins qui la hantent. Lost at Sea étant la première publication de Brian Lee O’Malley, on y retrouve déjà un goût pour les thématiques oniriques qui s’affirmeront dans ses œuvres suivantes.
Chats, chats partout ! |
Le style graphique de l’auteur se détache par sa fausse simplicité jouant sur le contraste noir et blanc. On ressent une influence du manga dans le chara-design et dans l’expression toutes en lignes de force des émotions des ses protagonistes tout en gardant sa pâte indéfinissable. Ce mélange rend son trait à la fois curieux et accessible.
Lost at Sea a en commun avec les livres spirituels de voyage son petit nombre de pages (une centaine) et le fait qu’à chaque lecture il peut s’appréhender d’une manière différente. Cela fait trois ans que je le dévore de façon régulière, et à chaque fois j’en ressors avec de nouvelles réflexions ou impressions.
Vous avez l’habitude que je vous conseille de vous rendre chez votre libraire préféré, mais pour cette belle bande dessinée, vous ne pourrez la dénicher qu’en anglais et uniquement sur Internet. Vous verrez, vous ne regretterez pas l’investissement !
Notez que que l’ouvrage existe en deux éditions : celle anniversaire des dix ans, dont sont extraites les images où l’auteur a retravaillé les couleurs en contraste de bleu et aplat rose, mais aussi la première édition plus classique, en noir et blanc.
■ Lost at Sea ■ Paru en mars 2005 ■ Ecrit et dessiné par Brian Lee O’Malley ■ Paru chez Oni Press ■ 169 pages